Marine et moi avons fait connaissance lors d’un workshop de femmes entrepreneures. En se partageant nos réseaux sociaux respectifs, je suis tombée sur la page Instragram sur laquelle elle partage sa vie en Tiny House.
J’ai toujours été intrigué par ce format d’habitation. J’ai déjà vu beaucoup de reportages et d’émissions sur ce phénomène mais je n’avais jamais eu l’occasion d’en visiter une.
Sur sa page Instagram, Marine nous raconte ses journées, son organisation de vie, de rangement et l’optimisation des espaces. Elle parle aussi du collectif d’habitat participatif dans lequel, elle et son conjoint Hugo sont investis depuis un an maintenant.
En voyant tout ça en virtuel, j’avais envie d’en savoir plus en réel.
C’est quoi une Tiny House ?
Une Tiny House est un habitat léger réversible. Léger car on peut la déplacer, et réversible car elle ne détériore pas le sol lors de son installation. C’est une petite maison à ossature bois qui est fabriquée sur une remorque. Ses dimensions sont limitées par la taille de la remorque et les obligations à respecter sur la route.
La Tiny de Marine et Hugo mesure 7m20 de long. Elle a été fabriquée en bois brut dans le Gers.
Voir grand et vivre petit
Originaires du Nord tous les deux, ils sont partis vivre à Toulouse en 2011 pour la poursuite des études d’Hugo. Ils y ont créé leur cocon et y ont trouvés une stabilité professionnelle. Lui était ingénieur aéronautique et elle, technicienne qualité sécurité environnement. Ils ont investi dans leur première maison, et ont construit leur famille avec l’arrivée de leur fils Axel.
Le manque de la famille se fait ressentir, ainsi qu’un manque d’épanouissement professionnel pour tous les deux. Puis le désir de changer de vie a fait sens lors du confinement. Ils voulaient revenir dans le Nord, mais quitte à revenir, autant revenir autrement, avec un nouveau projet et pourquoi pas, un nouveau mode de vie.
Se focaliser sur l’essentiel
Pour Hugo et Marine, leur plus grande richesse, c’est le temps. Malgré une belle situation professionnelle pour eux deux, ils ont pris conscience que ce n’est pas ce qui les rendaient heureux. Ils avaient besoin de réduire la cadence, de profiter de la vie. De travailler peut-être moins mais de se focaliser sur leurs principes et leurs valeurs. Ils constatent également qu’ils effectuent beaucoup de dépenses et se demandent pourquoi, et si tout cela est nécessaire. Au final, ce qu’ils veulent, c’est vivre simplement avec juste ce qu’il faut, sans fioriture.
Action – réaction
L’idée première c’était donc d’intégrer un groupe d’habitat participatif. Il s’agit d’un lieu de vie en collectif où tout est mutualisé (matériels, savoir-faire, nourriture…). Durant le confinement, ils font des recherches et se nourrissent de toutes ces informations. Ils feront la connaissance de Thomas qui vit lui-même dans une Tiny. Il l’a construite de A à Z et souhaite se lancer dans un projet professionnel en lien avec la construction. Après la visite et beaucoup d’échanges avec Thomas. Ils comprendront que c’est ça qu’ils veulent. Ce projet coche toutes les cases de leurs besoins. De plus, Thomas partage leurs passions et leurs valeurs. Alors construire une Tiny ok, mais pas sans lui !
Début des travaux en janvier 2021, et 6 mois après, les voilà sur la route, direction le Nord de la France !
Préparer la vie en Tiny
Lors de la conception de la Tiny, ils gardent en tête ce désir de vivre en collectif. Ils continuent donc d’éplucher les informations sur le net à ce sujet. De là, ils découvrent l’Eco Hameau Solidaire.
A leur retour dans le Nord, ils vont à leur rencontre. Le charme opère.
« Chaque collectif est différent, et à ce moment de notre vie, on se retrouvait complètement dans la charte de valeurs qu’Eco Hameau Solidaire proposait. La solidarité, l’entraide et l’autonomie alimentaire. »
Après avoir passé quelques mois sur un terrain à proximité de la famille, ils s’installent avec le collectif sur un terrain à Audincthun, en avril 2022.
Mais vivre en Tiny et en habitat participatif, ce n’est pas tous les jours évident. Même Si Hugo et Marine n’ont pas eu de difficulté pour s’installer dans le secteur, il reste possible que dans certaines communes le projet ne soit pas accueilli de manière enthousiaste. Pour l’habitat participatif, ce qui est difficile, c’est qu’il s’agit d’un concept trop peu connu. Le projet ne rentre dans aucune case administrative auprès des organismes bancaires ou d’assurance. « Un projet de ce style ne doit pas être une lubie mais plutôt un mode de vie dans lequel on est prêt à se lancer. Il y a une prise de risque qui doit être mesurée en amont. »
Ambitions et émotions
Quand je demande ce que ce grand projet leur a apporté aujourd’hui, je ressens beaucoup d’émotion de la part de Marine. « Paradoxalement, depuis que nous avons quitté nos emplois salariés, nous n’avons jamais autant travaillé. Cela demande énormément d’investissement. Mais on parle d’investissement que l’on réalise avec le cœur et surtout par conviction. C’est donc difficile de devoir dire stop et de se freiner. »
Ils ont pris conscience qu’il était important de vivre pour soi. Ils souhaitent montrer qu’une évolution est possible mais cela demande de mettre œuvre beaucoup de choses, beaucoup d’énergie et de dynamisme.
Tous deux ont plein d’idées, que ce soit professionnelles ou personnelles. Marine est également une girlboss. Elle a créée sa société Momentalité et propose d’accompagner les jeunes parents dans la grande aventure de la parentalité et Hugo a pour objectif de travailler avec une coopérative nommée Coopérative Oasis, qui a pour but d’accompagner les porteurs de projets comme celui-ci. Il est également investi dans un tiers lieu dans lequel se développe un atelier « low tech » (=technologie appropriable, durable et accessible que l’on met en œuvre soi-même).
S’adapter à une nouvelle vie
« Dans des projets alternatifs de ce genre, il n’y a énormément de personne qui font des burn-out car ils sont persuadés que c’est là qu’il faut aller et ils iront. Même au détriment de leur santé. Ils ont tendance à se mettre une pression qu’ils ne gèrent plus ensuite. »
Marine et Hugo ont la tête sur les épaules. Ils sont bienveillants et réfléchis. En cherchant à prendre du temps pour eux, ils se sont découverts. Là où parfois ils ne prêtaient pas attention à leur propre personne, aujourd’hui ils y sont obligés. Et cela a amené quelques constats, notamment pour Marine : « Moi qui pensais m’épanouir dans le bricolage, je me suis rendue compte que ce n’était pas spécialement quelque chose que j’affectionnais. J’adore apprendre et découvrir. Mais mettre en œuvre des réalisations importantes en termes de création, ce n’était pas moi. Vivre de façon plus simple ne sous-entend pas devenir le roi ou la reine de la bidouille et du bricolage. »
Objectif : être heureux
Ce que l’on constate surtout dans cette histoire, c’est qu’il existe une capacité à s’adapter et vivre d’une manière qui n’est pas forcément « dans la norme ». Un célèbre dicton dit que « pour vivre heureux, vivons caché », mais Marine et Hugo vont un peu à contrecourant de cette idée. Ils aiment partager ce qu’ils vivent et ce qu’ils créent. Même sur des projets longs, fastidieux, qui demandent beaucoup d’investissement physique et psychique, il est important de continuer à y croire et à s’y projeter.
La plus grande force de ce couple, c’est qu’ils sont deux, à savoir s’écouter et prendre conscience de ce qu’ils vivent. Ils auront réussi le pari de changer de vie, d’aller dans le sens de leurs convictions. La plus grande difficulté aujourd’hui, qui, je pense, parlera au plus grand nombre, c’est de ne pas s’oublier et de ne pas oublier l’objectif premier de ce projet qui est celui, de « prendre le temps ».
Retrouvez la vie de Marine et Hugo en Tiny House sur leur page Instagram : Let’s Tryny